mercredi 7 octobre 2015


Paroles


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Qu'on me laisse dans la terre 
Sans tombe et sans nom
Sans pierre et sans maison

J'ai dit, qu'on me laisse dans la terre
Sans couche et sans habits
Sans pleurs et sans paroles

Mourir au creux du sillon
D'où fleurira la vie.




3 septembre

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La mer accouche un enfant bizarre

Il a les yeux morts et la tête vide

Et dans sa poche

Des os





Le calme des morts


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Le calme est triste, oh le calme est moche! Et il va
Sur le sol, comme il va sur le ciel, comme il va 
sur les faces fendues des cadavres éventrés. 
Oh calme, curieux calme où vas-tu t'arrêter? 



dimanche 13 septembre 2015

L'année stalgie

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Avant,
J'aimais le doux parfum des fleurs de mon jardin
Qui roulait dans mes narines.
Et l'arbre petit, plein des bourgeons naissant,
Me plaisait aussi.

La nature était jeune et les feuilles vertes.
On aime ce qui nous ressemble.

Et puis,
J'ai aimé l'été jaune et son soleil brûlant
J'ai aimé courir sur le sable chaud de la plage dorée, 
Qui roulait sous mes pieds.
Et le fier albatros qui volait dans le bleu,
Me plaisait aussi.

La nature était puissante et les fruits mûrs. 
On aime ce qui nous ressemble. 

Aujourd'hui,
J'aime l'automne fatigué et sa pluie glacée
J'aime marcher seul sous les chênes rouges
Qui roulent devant moi et meurent à l'horizon. 
Et le triste saule et sa chevelure clairsemée,
Me plaît aussi.

La nature est vieille et l'abricot moisi.
On aime ce qui nous ressemble.



jeudi 20 août 2015



Morositas

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Je suis coincé dans un corps,
Coincé dans une chambre,
Coincée dans un cube,
Coincé dans la ville,
Noire.

Je suis coincé dans la ville,
Coincé dans le pays,
Coincé dans la sphère
Coincé dans l’Univers,
Noir.

Et si je pense
Mes idées sont coincées dans ma tête
Coincée dans mon corps
Coincé dans ma chambre.
Noire

Et si j’écris
Mes mots sont coincés sur la feuille
Coincée dans le cahier,
Coincé dans mes mains.
Noires

Ainsi, si je veux m’échapper
Il n’existe nul endroit qui ne soit,
Coincé dans un pays,
Coincé dans une sphère
Coincée dans un Univers,

Noir.



lundi 17 août 2015


J'arrivais à vingt ans

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J’arrivais à vingt ans au pied de millénaires,
Abordant solitaire le vaste inconnu.
Dans mes maigres paquets des années de galère
Et au fond de ma poche quelque idée perdue

J’arrivais à vingt ans, je dis c’était hier
Jeudi noir, jeudi gris, dans une ville rose.
En marchant je me voyais repeindre la pierre
Et les esprits petits des habitants moroses.

Je disais bien des « si », biens des « il faut changer ! »
- « Si l’on changeait le monde il tournerait bien mieux » -
Je me voyais déjà l’érudit du quartier
Et peut-être demain un bien savant monsieur.

Mais écumant toujours les rues de ma cité,
J’arrivais un matin dans un bar, ingénu.
J’ai commandé un verre et de verre en année
J’ai laissé dans l’ivresse quelque idée perdue.

Ides d'Arès

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Par-delà votre ciel se balance l’épée
Qui forgée de vos mains prend l’aspect d’un enfant.
Gare au faible perçant ! Imparties les années !
Par la lame mourra, ou par un nœud coulant.

Donc déchu moi fils roi, le dit « petit maudit »
Tète mamelle infâme éloigné de ses pairs
Ourdissant par les dieux le destin alloti
Grandissant le courroux à l’ombre de Mégère. 

Ainsi qu’on laisse aller sur ma face étrangère
Les sillons méconnus des aïeux éloignés
Et qu’ils me montrent alors la route familière
Qui croise mon destin et celui du passé.

J’irai t’assassiner, toi mon père abhorré
Accourant à Thèbes-ra pour mieux t’y enterrer.
Ces bras-là et leur sang que le stupre maudit
Je viendrai les punir et me punir aussi.

Enfin j’irai chez nous, te visiter Meter
Te voir user nos liens pour enserrer ton corps.
Balançant exsangue ainsi qu’épée de chair
Au-dessus de la couche et par-delà ta mort.

Tu resteras encore ombrageant le destin
Sur les années venant de tes nombreux enfants
Qui ainsi que l’oracle prédit sibyllin :
Par la lame mourront ou par un nœud coulant ! 


mardi 11 août 2015


Paname abhorré

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Les faubourgs encrottés des déchets noctambules
Les Passy faisandés, les Cliclis rabougris,
Ce schéma archaïque où les tacots circulent.
Ah! Paris! Tu es blette et pourtant si jolie.

Ton haleine est fétide d'alcool et de cons
Ton ciel est mansardé, de bonne il est chambré
Les putains dévêtues sucent ton mamelon
Ah! Paris! Tu es vieille et pourtant inchangée.

Sur ton front dégarni j'irai poser ma voix,
Y graver de mes mots le nom de mes aïeux
Et comme un vieux pigeon je crèverai sur toi.
Ah! Paris! Je te hais et pourtant je te veux!

lundi 13 juillet 2015


Il faut couler pour remonter

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Dors, au creux des mains de la nuit
Remets au ciel la noirceur de tes songes
Et si le jour viens
Ne lui ouvre pas ta porte,
Tu ne veux pas te réveiller.

Dors, sous le saule éploré
Remets au feuillage la dureté de tes maux
Et si l’oiseau chante,
Ne succombe pas à son appel,
Tu ne veux pas te réveiller.

Dors, sur le sol moite de la plaine
Remets à l’herbage l’âpreté de ton sort
Et si la fourmi toque à ton dos,
Ne lui ouvre pas la porte,
Tu ne veux pas te réveiller.

Alors enfin,
Dors, au plus profond des eaux
Remets aux abysses la froideur de ton âme.
Et remarque qu’ici aucun poisson ne chante.
Comprends.

Là, au creux des enfers où nul ne te vois
Le soleil ne descend plus jusqu’à toi.
Et quand alors, personne ne frappe à ta porte
Ouvre-la.
Désormais, tu veux te réveiller. 

mercredi 17 juin 2015




Épitaphe 

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Ô passant !
Toi qui viens écorer ton regret solitaire
Sur la pierre abîmée de ma stèle angulaire.
Etranger !
Déroule ton tapis, assied toi sur mon dos
Mais avant, écoute le lament des oiseaux.

Ô guerrier !
Toi qui fuis ta contrée, sous le feu de la guerre
Éploré, apatride, un radeau à la mer.
Etranger !
Déroule ton tapis, assied toi sur mes os
Mais avant, écoute le lament des oiseaux

Ô cadavre !
Toi qui gis sur tes pieds, langoureuse agonie
Combattant l’obligé, malheureuse harmonie.
Etranger !
Déroule ton tapis, assied toi sur mon dos
Regarde mon tombeau, reconnais-y le tiens,
Ci-gisent les poètes, les enfants chagrins
Qui passant éphémères, ont estampé leur maux
Assied-toi !
Déroule ton souci, viens étayer le nôtre
Et deviens à ton tour, du malheur un apôtre.

Toi! qui nage invisible dans le creux des eaux
Toi! qui passe éphémère ainsi qu’un vol d’oiseau !


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lundi 15 juin 2015




3, rue Bastet


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Dans la ruelle étroite, alignées les demeures,
Étalés les pavés jusqu’au loin éthéré.
Saisissant la béance, rentre la lueur
Orangée, vespérale, faisceaux anémiés. 

Au milieu de l’étroit, qui repose en ses terres,
Le chat veille assoupi, ainsi qu’un simulacre,
Éclatant de son poil, déchirant le parterre,
Il attend silencieux l’heure qui le consacre

Et quand sonne minuit, aux coups alexandrins,
Que le divin esprit exhalé du sommeil
Langoureux animal, au regard olympien  

Vient frotter malicieux, son pelage vermeil,
Je me laisse approcher de la nymphe maline.

La nuit, les chats sont gris et les femmes félines !


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Pensée


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Si l’on regarde
Bien,
La peau blanche
Est marron claire.


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Pater marmoris


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Sous la ronce s’endort, la trogne paternelle,
L’idole impénétrable aux accents sibyllins,
Le regard échappé, dérobé aux mortels,
Qui-es-tu, étranger, qui côtoie le divin ?

Longtemps j’ai déposé, sur ton nom archaïque
Les élans idolâtres, ainsi que des encens
Qui montant à ta cime, excitaient sporadique
L’intérêt éphémère d’un père indolent.

Et croulant sous le poids, d’un mal congénital
Qui relègue l’amour au rang de l’abyssal
Ô Pater marmoris, ton énigme est pérenne !

Là ! tu gis, homme oiseau, un phœnix rocailleux
Du haut du piédestal, tu ignores l’adieu,
J’ai aimé t’adorer, dorénavant je t’haine !



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dimanche 14 juin 2015

Silence


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Pan !
Le cœur qu’on assassine.
Pan ! Fait la balle.
Et le corps tombe, silencieux.

-
La voix éteinte.
-  Fait la voix
Évanouie, silencieuse.

Autour, plus rien.
Les passants ne passent plus.
Le bruit des souffles coupés nous englobe.


Pan !


Dernier son d’une civilisation à l’agonie.


Pan !


Le rouge et le blanc,
Et le bleu mélangés
Éclaboussent les visages.

Le silence pèse.

Pan !

Tapi, l’assassin guette,
Parmi les hommes,
Dans le silence assourdissant de la stupeur.

Là-haut le ciel brûle,
L’oiseau chante,
Le vent souffle.

Pan !


Au sol, gît la république.



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Madame


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Madame !
Je vous aime.
                                    - Elle riait –

Vous êtes belle comme l’automne,
                                Vous êtes belle comme l’aurore.                                

Madame !
Je vous aime.
                                    - Elle riait –

Comme j’aime le vent d’été,
Qui balaie l’herbe sèche.

Madame !
Je vous aime.
                                   - Elle riait –

Et le temps je le vole
Et puis je vous le donne.
Pour que chaque jour d’amour
Nous le passions ensemble,
A compter un par un
Toutes les raisons qui font
Que souvent vous riez,

Que Madame je vous aime.


Temps mort


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La vapeur naît au cœur, et saisit alentours,
Noire nue, nuée noire, assombrit mon esprit.
Spleenétique est la vue de la vie de nos jours,
Ah ! Vraiment je respire en des temps évanouis.

Et quand errent hasardeux, mes regards courbatus,
Qu’aspirés fatalement vers le cadre ajouré
Ils contemplent en l’éther, les siècles étendus,
Il revient de leur trip, un bonheur trépassé.

Jamais donc je n’irais, au pays si lointain
Des amours clandestines d’amoureux transis
Des messieurs cocodès, aux illustres inouïs

Et des chairs opalines flattées d’embonpoint.
La langueur est hectique, amer est le destin,

Ah ! Vraiment je respire en des temps évanouis.


À Dieu.

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Si l’esprit prétentieux, bâtit des cathédrales
Si des pierres des montagnes, il conçoit des autels,
Qui de leur gravité, désavouent l’abyssal
C’est vainement, pour tenter de toucher l’éternel.
Et s’il pense ingénu, transcender le cosmos
Il ne fait qu’allonger l’agonie du mourant
Qui prenant fatalement, l’écumoire céleste.
Voit ses rêves y rester, quand il tombe à jamais.


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L'Éphémère


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Les pas dans le sable laissent des empreintes,
Creuses et rondes.
Elles racontent un peu le voyage du promeneur,
Au bord de l’eau claire.

                                                 La mer les efface.
                                                         Rien ne dure.

Le parfum des fleurs vole à tes narines,
Creuses et rondes.
Il transporte un peu le travail de l’abeille,
Partout dans la prairie.

                                                    Le vent l’efface.
                                                         Rien ne dure.

Le chant de l’oiseau caresse mes oreilles,
Creuses et rondes.
Il berce un peu mon sommeil.
Au petit matin clair.

                                                 Le temps l’efface.
                                                         Rien ne dure.

Mes cheveux blancs, forment des boucles,
Creuses et rondes.
Ils disent qu’est venu le moment de partir,
Où demeurent les souvenirs.

                                                  Le temps m’efface.
                                                             Rien ne dure.


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Hateshinai

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L’arbre chuchote sous la quiétude du printemps
Bercé par le vent muet.
Secret, l’oiseau se cache parmi les fleurs
Qui se cachent parmi les feuilles,
Qui se cachent parmi les branches.
Ainsi ils vont.

L’eau moirée ondule, reflétant l’éternel
Mue par le vent muet.
Elle glisse toujours dans le même sens
Pour mourir dans le fleuve,
Qui meurt dans la mer.
Ainsi ils vont.

La graine ancestrale vole de corps en corps
Portée par le vent muet.
Elle a fleuri dans ma mère
Qui a fané pour que je fleurisse à mon tour,
Et que de moi bourgeonne aussi.
Ainsi nous allons.


Bon voyage

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Au fil de l’eau
Glisse la feuille
Je ne sais où.

Dans ses bras,
Mon cœur


La mer

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Couchée, la mer est bleue
Qui balaie le rivage,
La mer est belle.
Nue, le corps opalin,
Douce, la figure calme,
La mer morte.

Le sable chaud ne fait rien,
Il attend.
Clair et doux le sable attend
Toujours,
Que la mer se réveille,
Et qu’elle mouille la jetée.

Mais la Mère morte.